Devant les portes

Dans les sombres couloirs du château de Poudlard, tout était silencieux. Pas un son, pas une voix. Rien. Le calme plat ou, comme on dit, le calme avant la tempête, car en effet, il flottait dans l'air une onde d'excitation qui ne pouvait annoncer qu'une chose: la rentrée scolaire!

Les armures des chevaliers étaient plus brillantes, les fantômes plus empressés à traverser les murs, les tableaux plus volubiles et finalement, même les pierres semblaient attendre avec impatience d'être envahies par une horde d'élèves sauvages et indisciplinés.

L'impatience gagna même deux blocs de marbre particulièrement froids, mais non moins vivants. Le bloc de droite bougea soudain, révélant sa nature dans la lumière d'un flambeaux et l'éclairage solaire en provenance des longues fenêtres étroites. Il s'agissait, pour tout dire, d'un lion, de bel apparence notez bien. Il n'avait qu'une fêlure à la patte gauche.

Il bailla soudain, dévoilant une rangée de dents usées par l'âge et le temps. Cela restait tout de même très impressionnant pour les néophytes et le lion comptait bien en profiter pour en imposer aux nouveaux arrivants. Les vieux élèves passaient devant lui sans même le saluer en fin d'année. Quel manque de respect!

Le lion tourna sa tête de pierre en direction de son voisin, un autre lion, son jumeau identique.

"Kerchouk! Réveille-toi! On doit mettre au point une nouvelle énigme avant l'arrivée des sorciers!"

Le lion de gauche souleva ses lourdes pattes de sur son museau et les étira longuement avant de cligner des yeux à de nombreuses reprises. Son regard se posa d'abord sur la salle qui s'éveillait elle aussi tranquillement puis croisa l'ai réprobateur de son frère de droite.

-"Pourquoi est-ce que tu me regarde ainsi! L'année n'est même pas commencé que déjà, tu te sens le besoin de me terroriser!" affirma Kerchouk qui n'avait pas entendu le précédent dialogue de son jumeau.

"Ah parce que je te terrorise grand niais?"

Lorsque Kerchak parlait, il dévoilait ses crocs autant que possible car c'était du meilleur effet (ce qui le gâchait un peu, c'est qu'il passait souvent sa langue sur ses dents pour s'assurer qu'elles y étaient toujours, ce qui produisait un désagréable bruit de pierre sur pierre).

"Et qu'est-ce que ce sera quand il faudra affronter les terribles enfants de première année ouhouhouh, j'ai peur, aide-moi Kerchak, je meurs de trouille", fit le dit Kerchak en imitant son collègue.

"Arrête de trembler et écoute-moi. Il faut qu'on change d'énigme. Je ne sais pas où ils ont trouvé le truc, mais tout le monde semble connaître la réponse de notre dernière énigme. Elle était pourtant bonne... qu'est-ce qui marche à quatre pattes le matin, à deux le midi et à trois le soir..."

Kerchak se plongea un bref moment dans ses réflexions. Il ne se souvenait pas d'où venait cette énigme, mais elle possédait une certaine aura de puissance. Dommage de la perdre comme ça.

"Donc, j'ai cogité toute la nuit. Qu'est-ce que tu penses de: Je suis dans l'étang et au fond du jardin, je commence la nuit et finis le matin et j'apparais 2 fois dans l'année, qui suis-je ? Allez, devine Kerchouk!"

De plaisir anticipé (et aussi de fierté), Kerchak balançait sa queue belle et neuve comme au premier jour ou presque quoi!

Tout comme les paroles de son jumeaux de frère parvenaient à ses oreilles, Kerchouk sorti de sa cachette improvisé sous ses pattes et sembla tiré de sa stupeur. Ses sourcils se soulevèrent jusqu'à souligner un air incrédule sur son visage de pierre...

-"Dis donc, tu ne nous l'a pas déjà fait celle-là il y quelques décénnies déjà? Je me rapelle très bien l'avoir entendu!" dit fièrement Kerchouk en évitant d'ajouter qu'en ce qui concernais la réponse, il ignorais tout.

"QURRRROARRR? Est-ce que tu insinuerais que j'ai la mémoire défaillante?"

Kerchak marqua une pause, le temps d'admirer sa patte de pierre qu'il leva à la hauteur de ses yeux. Il évalua l'état de ses coussinets avant de répondre.

"Après tout, tu as raison sur un point. On l'a déjà utilisée il y a 350 ans, mais les élèves de nos jours ne s'en souviendront pas tout de même! Ils ont moins de mémoire qu'une fourmi qui a perdu sa lligne."

Il passa une langue de pierre sur ses coussinets, créant un horrible bruit de pierre contre pierre. Il s'arrêta soudain en plein mouvement, la langue encore collée sur sa patte, l'oreille aux aguets. Il retint son "souffle" (vu sa condition, il n'avait pas réellement de souffle comme vous vous en doutez).

Un grand frisson le parcourut de la tête à la queue, s'il avait eu des poils autres que sculptés, pas de doute qu'ils se seraient hérissés. Une chose horrible venait de se produire. Quelques chose... de maléfique s'éveillait dans les vieilles pierres du château de Poudlard. Les muscles de pierre du lion se contractèrent involontairement tandis que l'impression s'estompait sans toutefois disparaître. Le tout restait légèrement en retrait.

"Tu as senti ça?", demanda-t-il à son frère.

Quelques minutes passèrent à peine avant que les lions sentent l'arrivée des élèves dans les murs du château.